Un Palestinien de 58 ans exécuté à l’aube devant la porte d’une boulangerie

La semaine dernière, à Tubas, une localité du nord de la Cisjordanie occupée, les forces israéliennes ont abattu et tué un Palestinien alors qu’il rentrait chez lui après les prières de l’aube. Une vidéo publiée par des médias palestiniens montre le moment où Salah Tawfiq Sawafta, 58 ans, a été abattu d’une balle dans la tête. L’image montre un homme non armé tentant de s’abriter dans une boulangerie, juste avant de s’effondrer brusquement. Il gît sur le sol pendant plusieurs secondes avant que les infirmiers arrivent et l’évacuent sur une civière.

19 août 2022. Des Palestiniennes en deuil lors des funérailles de Salah Tawfiq Sawafta, tué quelques heures plus tôt par les forces israéliennes dans la ville de Tubas, dans le nord de la Cisjordanie. (Photo : Stringer APA images)

19 août 2022. Des Palestiniennes en deuil lors des funérailles de Salah Tawfiq Sawafta, tué quelques heures plus tôt par les forces israéliennes dans la ville de Tubas, dans le nord de la Cisjordanie. (Photo : Stringer APA images)

Maureen Clare Murphy, 22 août 2022

L’armée israélienne a déclaré qu’au cours de son raid sur Tubas,

« nombre d’hommes armés avaient lancé des cocktails Molotov et ouvert le feu sur les militaires, qui avaient répondu en tirant à leur tour »,

a rapporté Al Jazeera.

Zakaria Sawafta, un témoin oculaire, a expliqué à l’agence d’information Reuters que Salah Sawafta

« retournait chez lui quand il avait appelé Abu Obeida [le propriétaire de la boulangerie] afin de pouvoir entrer parce que des détonations avaient retenti ».

Mais Sawafta avait été touché à la tête avant de pouvoir se réfugier en lieu sûr.

Citant le témoin oculaire, Reuters a rapporté que

« les forces israéliennes étaient positionnées au sommet d’un grand immeuble proche et (…) qu’il n’y avait pas d’affrontements dans ce coin-là ».

Des médias locaux ont rapporté que Sawafta était sur le point de fêter le mariage de sa fille le 26 août et qu’il partageait des images de l’invitation.

https://twitter.com/ShehabAgency/status/1560550587707654148?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1560550587707654148%7Ctwgr%5E7447ba65de31521a32deaf81e78678dd9976542c%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Felectronicintifada.net%2Fblogs%2Fmaureen-clare-murphy%2Fpalestinian-man-executed-outside-bakery

Des raids nocturnes meurtriers

Il est fréquent que des Palestiniens soient tués lors des raids quasi nocturnes d’Israël contre les communautés palestiniennes.

La veille du jour où Sawafta a été mortellement blessé, les soldats ont tué Wasim Nasser Khalifa, 18 ans, d’une balle dans la poitrine, lors d’un raid dans la ville de Naplouse, en Cisjordanie.

Et, lundi dernier, les forces d’occupation israéliennes ont abattu Muhammad Shaham, 21 ans, d’une balle dans la tête au cours d’un raid chez lui, à Kufr Aqab, une ville de la région de Jérusalem.

« Quand les forces d’occupation israéliennes ont vu Muhammad, elles l’ont abattu à bout portant et blessé d’une balle réelle dans la tête »,

a fait savoir Ibrahim Shaham, le père de Muhammad, au Centre palestinien pour les droits humains (PCHR).

« Mon fils ne s’est pas battu contre les soldats qui ont fait irruption chez nous, mais eux ont ouvert le feu sur lui sans avertissement préalable et même sans lui demander qui il était. »

Cela fait longtemps que les observateurs des droits humains condamnent la politique israélienne de la gâchette facile contre les Palestiniens.

Le texte de mesures israéliennes concernant le déclenchement des tirs est secret. Mais, l’an dernier, des médias israéliens ont rapporté qu’en Cisjordanie, les troupes avaient l’autorisation de tirer sur des Palestiniens qui jetaient des pierres ou des cocktails Molotov sur des voitures civiles, même quand ils ne posaient pas de menace immédiate.

Jusqu’à présent, cette année, quelque 120 Palestiniens ont été tués par l’armée et les forces de police israéliennes, dont 70 environ en Cisjordanie.

 

Un soldat tué par un tir ami

L’homicide d’un soldat israélien par un autre, la semaine dernière, est un bel exemple du laxisme des réglementations israéliennes.

Une enquête préliminaire par l’armée israélienne a conclu que le soldat auteur du tir avait correctement suivi les procédures de déclenchement de tir quand il avait tué Nathan Fitoussi dans les dernières heures du 15 août.

Selon The Times of Israel,

« la procédure inclut d’intimer l’ordre au suspect de s’arrêter, de tirer en l’air et de n’utiliser la force létale que si le soldat se sent menacé ».

Le soldat abattu avait quitté le poste de garde près de la ville de Tulkarem, en Cisjordanie, afin de prier et il avait été abattu à son retour.

« Selon l’enquête initiale, il y avait plusieurs mètres de distance entre les deux hommes, lors des coups de feu tirés tard dans la nuit »,

a rapporté The Times of Israel.

« Fitoussi a été touché deux fois, et on ne voit pas exactement pourquoi il a été perçu par erreur pour une menace. »

Les réglementations laxistes d’Israël concernant le déclenchement des tirs ont apparemment contribué à la mort par balles de deux soldats dans la vallée du Jourdain, plus tôt cette année.

 

Washington demande à Israël de revoir ses règlementations sur le déclenchement de tir

Suite à la mort par balles de la journaliste palestino-américaine Shireen Abu Akleh, l’administration Biden aurait demandé à Israël de revoir ses règles d’engagement lors des opérations militaires.

La correspondante vétérane d’Al Jazeera portait un gilet pare-balles et un casque de protection la désignant manifestement comme membre de la presse quand elle avait été touchée à la tête alors qu’elle couvrait un raid dans la ville de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie, en mai dernier.

L’avocat général de l’armée israélienne a déclaré que l’homicide d’Abu Akleh était une « péripétie de combat » et que, pour cette raison, aucun soldat n’était susceptible d’avoir à affronter des charges criminelles.

Israël a utilisé la même interprétation sans fondement de la loi internationale pour justifier le recours à la force létale contre les manifestants non armés de Gaza lors des protestations de la Grande Marche du Retour entre mars 2018 et décembre 2019.

Israël a prétendu que les protestations de masse étaient orchestrées par le Hamas, le parti politique et organisation de résistance qui contrôle les affaires internes de Gaza.

Les directives militaires israéliennes requièrent une enquête criminelle immédiate sur la mort d’un Palestinien en dehors d’une activité de combat.

Plus de 215 Palestiniens ont été tués au cours des protestations de la Grande Marche du Retour. Un seul soldat israélien a été inculpé fin 2020 pour s’être servi de balles réelles.

Al Jazeera, qui a obtenu une image de la balle qui a tué Shireen Abu Akleh, a déclaré que la journaliste avait été touchée par une balle perforante de conception et de fabrication américaines, d’un calibre de 5,56 mm (.22) que l’on utilise dans un fusil d’assaut M4.

Près de 60 membres du Congrès américain, dont la moitié des sénateurs démocrates, ont demandé à l’administration Biden qu’elle enquête sur la mort de Shireen Abu Akleh.

 

Plus de 100 jours après son assassinat, l’administration Biden refuse toujours d’ouvrir une enquête et elle continue d’en référer au mécanisme d’auto-enquête depuis longtemps discrédité de l’armée israélienne.

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Publié le 22 août sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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