Israël tue des dirigeants du Djihad islamique lors d’un raid surprise sur Gaza

Très tôt, ce mardi, des avions de combat israéliens ont frappé plusieurs sites à Gaza, tuant trois dirigeants du Djihad islamique ainsi que plusieurs autres personnes, portant ainsi le nombre initial de morts à 12.

 

Israël tue des dirigeants du Djihad islamique lors d'un raid surprise sur Gaza : Nuage de fumée suite à une frappe aérienne israélienne contre Gaza, le 2 mai.

Nuage de fumée suite à une frappe aérienne israélienne contre Gaza, le 2 mai. (Photo : Youssef Abu Watfa / APA images)

 

Maureen Clare Murphy, 9 mai 2023

L’armée israélienne a annoncé sur Twitter qu’elle avait entamé le début d’une opération dans ce qui constitue donc une nouvelle escalade importante et, en même temps, un nouvel épisode de terreur pour la population assiégée de Gaza, forte aujourd’hui de 2,2 millions d’habitants.

 

Des « responsables de la sécurité » restés anonymes ont déclaré « s’attendre à l’une ou l’autre réponse militaire du Hamas ; une nouvelle série de combats – s’étalant sur deux journées au moins – est très probable », a rapporté Haaretz, le quotidien de Tel-Aviv.

Israël a expliqué qu’il « frappait des cibles du Djihad islamique » à Gaza, alors que des mises à jour postées sur les médias sociaux depuis le territoire ont clairement indiqué que des avions de combat bombardaient des maisons et d’autres cibles civiles.

 

La faction de la résistance palestinienne a donné les noms de ses chefs assassinés : Jihad Shakir Ghanam, secrétaire de son conseil militaire, Khalil Salih al-Bahtini, un commandant dans le nord de Gaza, et Tariq Muhammad Izzedine, qui aidait à diriger les activités de l’organisation en Cisjordanie.

 

 

Le Djihad islamique a déclaré sur Telegram que les épouses des dirigeants assassinés et plusieurs de leurs enfants avaient également été tués.

L’attaque surprise s’est avérée une répétition des frappes non provoquées qui avaient ciblé un important commandant du Djihad islamique en août dernier, déclenchant ainsi le lancement de salves de roquettes à partir de Gaza.

 

Près de 40 Palestiniens avaient été tués par les frappes israéliennes sur Gaza entre le 5 et le 7 août de l’an dernier. Et 13 autres, toujours à Gaza, avaient été tués durant cette même période, soit par les forces israéliennes, soit par des roquettes palestiniennes défectueuses qui étaient retombées sur le territoire même de l’enclave.

Plus tard, d’autres Palestiniens encore avaient succombé à leurs blessures, dont un garçonnet de 10 ans décédé au début 2023 suite à ses blessures subies lors d’une frappe israélienne.

Durant ces trois jours, il n’y a pas eu de morts ni de blessés graves en Israël à la suite de tirs en provenance de Gaza.

 

Israël sabote le cessez-le-feu

Israël a un long passé de sabotage délibéré des cessez-le-feu convenus avec les organisations armées de Gaza, tel celui qui a mis un terme à une journée de tirs transfrontaliers la semaine dernière.

Les forces israéliennes et les factions de la résistance palestinienne à Gaza ont échangé des tirs pendant une journée suite au décès, mardi dernier, du prisonnier palestinien et gréviste de la faim, Khader Adnan, qui était également une personnalité du Djihad islamique.

Au cours de cet épisode d’une journée, un civil palestinien de 58 ans était mort après que les bombardements israéliens avaient fait s’effondrer sur lui la toiture de sa maison.

En ciblant les dirigeants de faction ce mardi, Israël s’est embarqué dans une nouvelle guerre de choix contre la bande de Gaza, régulièrement bombardée, et qui subit un blocus total depuis 2007.

Quelques heures avant que soit lancée la campagne israélienne de bombardement, Eli Cohen, le ministre israélien des Affaires étrangères, a eu un entretien téléphonique avec son homologue américain Antony Blinken. Durant l’appel, le secrétaire d’État américain a paraît-il « insisté sur l’importance des récentes rencontres à Aqaba et Sharm El Sheikh visant à réduire les tensions », a déclaré un porte-parole.

D’autres ont pris le timing des bombardements pour vouloir dire le contraire de ce que prétend le département d’État – qu’au lieu d’encourager la désescalade, il a donné à Israël le feu vert pour viser les dirigeants de la résistance palestinienne à Gaza.

 

Itamar Ben-Gvir, le ministre d’extrême droite de la sécurité nationale en Israël, a célébré le bain de sang sur Twitter, en disant qu’il était « à peu près temps ! ».

Le portefeuille de Ben-Gvir comprend l’autorité sur les Services carcéraux israéliens (IPS), que les organisations des droits humains accusent de la mort de Khader Adnan.

Ben-Gvir et Benjamin Netanyahou, le Premier ministre d’Israël, ont publiquement exprimé leur désaccord à propos de Gaza, alors que Ben-Gvir cherchait une réponse encore plus dure que celle de Netanyahou aux tirs de roquettes de la part des Palestiniens.

La lutte de pouvoir a soulevé des questions « sur la stabilité du partenariat entre le Likoud [de Netanyahou] et le parti d’extrême droite Force juive [de Ben-Gvir] », a expliqué lundi le journaliste Mazal Mualem dans Al-Monitor, une publication sur Internet.

L’armée, la police et les civils armés israéliens ont jusqu’à présent tué 124 Palestiniens depuis le début de cette année, affirment les calculs de The Electronic Intifada. Ce nombre comprend les Palestiniens qui sont morts de blessures subies antérieurement.

Vingt Israéliens et ressortissants étrangers ont été tués par les Palestiniens durant la même période ou sont mort de blessures subies antérieurement.

 

Exécution extrajudiciaire à Tulkarem

Samedi, les forces israéliennes ont tué deux Palestiniens, identifiés comme Samer al-Shafei et Hamza Kharyoush, tous deux 22 ans, au cours d’un raid dans la ville cisjordanienne de Tulkarem.

Israël a prétendu que les hommes avaient effectué une attaque par balles contre une colonie toute proche un peu plus tôt dans la semaine, blessant ainsi un civil.

Une vidéo montre al-Shafei et Khayroush gisant sur une toiture en tôle, apparemment sans vie, alors qu’un soldat israélien les examine en les retournant du pied. La vidéo ne montre pas que les militaires tentent d’abord de fournir les premiers soins.

Des témoins oculaires ont déclaré à l’adresse des médias palestiniens que les soldats avaient laissé les deux hommes se vider de leur sang et qu’ils avaient ensuite tiré sur eux à bout portant pour s’assurer qu’ils étaient bien morts.

 

Il semble bien que le raid de Tulkarem soit une autre opération d’exécution extrajudiciaire israélienne avec l’intention de tuer plutôt que d’arrêter les hommes recherchés.

La semaine dernière, les forces d’occupation ont tué trois Palestiniens dont Israël prétend qu’ils étaient impliqués dans une fusillade qui avait tué une Britannico-Israélienne et deux de ses filles le mois dernier.

Netanyahou a félicité les hommes qui ont effectué le raid meurtrier de jeudi pour « avoir réglé nos comptes ».

Les organisations des droits humains protestent depuis très longtemps contre cette politique israélienne du « tirer-pour-tuer », en disant qu’elle équivalait à une sentence de mort de facto, même si la peine capitale est toujours interdite dans ce pays.

 

« Un soldat qui obéit aux ordres »

B’Tselem, une organisation israélienne des droits humains, a déclaré que Netanyahou était responsable de

« la transformations des policiers, et même des civils armés, en juges et bourreaux »

qui abattent et tuent des Palestiniens dans les rues.

Ce travail de vigilance quotidienne, attisé par les incitations racistes des hauts dirigeants israéliens, a très certainement joué un rôle aussi dans la mort par balles, samedi, de Diyar Omari, 19 ans, un citoyen palestinien d’Israël.

Israël prétend qu’Omari a été tué dans le nord du pays au cours d’une violente querelle sur la route. Mais une vidéo de l’incident meurtrier montre que c’est Omari qui a été attaqué par un Israélien identifié comme étant Denis Mukin, que l’on voit éloigner Omari de son véhicule avant de lui tirer dessus alors qu’il tente de remonter dans sa voiture.

Mukin, dit-on, a été arrêté par la police israélienne.

« Malgré la déclaration par la police israélienne que la mort d’Omari n’était pas motivée politiquement ou par des considérations nationalistes »,

la publication israélienne +972 Magazine a rapporté :

« Un sentiment prédomine largement parmi les citoyens palestiniens : Mukin, qui venait précisément de terminer son service de rappel à l’armée, a été prompt à se servir de son arme suite à l’atmosphère hypernationaliste et anti-arabe qui n’a cessé de fermenter depuis ces dernières années. »

La publication d’ajouter :

« Cette atmosphère, disent-ils, a été particulièrement encouragée par le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, qui a invité récemment les civils israéliens à porter des armes et a insisté pour que l’on permette aux réservistes de porter une arme à feu sans disposer pour autant d’une licence spéciale. »

« [Ben-Gvir] a littéralement demandé aux juifs de porter des armes et de tenir le doigt sur la détente – et c’est exactement ce qu’il [Mukin] a fait. Il était un soldat qui obéissait aux ordres »,

a déclaré Ahmad Omari, le père de Diyar, dans le magazine en ligne.

 

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Maureen Clare Murphy est rédactrice en chef de The Electronic Intifada.

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Publié le 9 mai 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

 

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