Les camps de réfugiés palestiniens craignent une poussée du virus

Les camps surpeuplés de réfugiés palestiniens craignent une poussée du virus

Hossam Ezzedine, 30 juillet 2020

Au camp de réfugiés d’Al-Amari, en Cisjordanie occupée, plus de 8 000 personnes vivent sur moins d’un kilomètre carré. (Photo : AFP / Abbas Momani)  

Au camp de réfugiés d’Al-Amari, en Cisjordanie occupée, plus de 8 000 personnes vivent sur moins d’un kilomètre carré. (Photo : AFP / Abbas Momani)  

Al-Amari (Territoires palestiniens occupés) (AFP) – Une deuxième vague d’infections au coronavirus balaie la Cisjordanie occupée par Israël et alimente ainsi les craintes d’une nouvelle poussée dans les camps surpeuplés de réfugiés palestiniens où la distanciation sociale est pour ainsi dire impossible.

Au départ de la pandémie de Covid-19, en mars, l’Autorité palestinienne a imposé un lock-down afin de tenter d’endiguer les infections.

Mais après qu’Israël et, un peu plus tard, l’AP, ont allégé les restrictions, à la fin du mois d’avril et en mai, le nombre de cas s’est accru de nouveau, exacerbé cette fois par des infractions aux limites imposées aux rassemblements publics et aux déplacements.

Un facteur majeur a été les travailleurs palestiniens se rendant à leur travail en Israël tout proche ou en revenant, prétend l’AP.

L’Etat juif est entré en lock-down à la mi-mars mais, après avoir allégé les restrictions, il n’a pas tardé à faire état de 1 000, voire 2 000 nouvelles infections au coronavirus par jour et a donc réimposé certaines restrictions.

La mise à jour de mardi du ministère palestinien de la santé publique a enregistré au moins 10 860 cas confirmés d’infection depuis le début de la pandémie, y compris plus de 75 décès.  

A titre de comparaison, le total accumulé à la date encore récente du 1er juillet était encore de moins de 2 700 infections et de 7 décès.

L’aggravation de la crise sanitaire suscite une grande inquiétude dans les camps.

Les Nations unies estiment qu’environ cinq millions de Palestiniens ont le statut de réfugiés.

Ils sont les survivants et les descendants des plus de 700 000 personnes qui ont été expulsées ou ont fui leur terre en quelque mois, en 1948, au moment de la création d’Israël.

Plus de 1,5 million d’entre eux vivent dans des camps au Liban, en Syrie, en Jordanie, dans la bande de Gaza, en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est annexée par Israël.

Ils sont assistés par l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA), qui leur fournit une aide médicale et gère pour eux des écoles.

Au camp d’Al-Amari, près de Ramallah, en Cisjordanie occupée, quelque 8 000 personnes vivent entassées dans un espace de moins d’un kilomètre carré.

L’UNRWA dit du camp qu’il est confronté à des « problèmes significatifs de surpopulation ».

« Il n’y a pas d’espace, ni pour imposer une distanciation, ni pour appliquer des quarantaines », a déclaré Taha Al-Bess, l’un des responsables du comité des habitants du camp.

Qui est responsable ?

Au moment d’entrer dans le camp d’Al-Amari, la route a environ six mètres de large, mais elle rétrécit rapidement une fois qu’on est entré dans le camp, avec des allées ne faisant jamais plus de trois mètres de large.

« Les rues sont étroites, les bâtiments sont très proches les uns des autres et ce serait une illusion que de parler de distanciation »,

a expliqué Al-Bess.

Dans toute la Cisjordanie, occupée par Israël lors de la guerre des Six-Jours, en 1967, quelque 190 000 réfugiés palestiniens vivent dans 19 (dix-neuf) camps.

Peu de cas de maladie et aucun décès n’ont jusqu’à présent été enregistrés à Al-Amari, mais le comité du camp suit les développements dans les autres camps avec une certaine inquiétude.  

A Jalazoun, également près de Ramallah, plus de 200 cas ont été enregistrés ces toutes dernières semaines, ainsi que deux décès, sur quelque 8 000 réfugiés.

Au camp d’Al-Fawar, près de Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, les données sont du même ordre.

« Il est impossible d’appliquer la distanciation et d’empêcher le contact entre les malades et les autres résidents »,

a expliqué Nael Nakhleh, un membre d’un comité d’urgence établi à Jalazoun pour tenter d’endiguer la résurgence de la contamination.

Un débat s’est élevé quant à savoir qui est responsable de la gestion de l’urgence sanitaire dans les camps : l’Autorité palestinienne ou l’UNRWA ?

Les ressources sont rares

Pour Ahmed Hanoun, responsable des affaires des réfugiés au sein de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), la responsabilité incombe à l’agence des Nations unies.

« Nous essayons de travailler avec eux », a-t-il expliqué à l’AFP, en disant qu’il était « extrêmement inquiet » de la poussée du virus dans les camps.

A l’UNRWA aussi, l’inquiétude est profonde, particulièrement du fait que la pandémie est arrivée à un moment déjà interpellant.

En 2018, les Etats-Unis, qui étaient les principaux donateurs de l’agence, ont annoncé qu’ils mettaient un terme à leur aide financière annuelle de 300 millions de USD, prétendant qu’elle n’était plus pertinente, 70 années après la création d’Israël.

« La situation dans les camps est très embarrassante, surtout lorsqu’on considère les difficultés financières de l’agence », a déclaré Kazem Abu Khalaf, porte-parole de l’UNRWA en Cisjordanie.

L’UNRWA a multiplié ses appels aux dons et à l’aide de la part de ses autres donateurs et sponsors.

A Al-Amari, les résidents ont décidé de prendre des mesures de leur propre chef et d’organiser un piquet à l’entrée du camp afin de prendre la température de toute personne qui désire y entrer.

« L’UNRWA déclare qu’elle n’a pas les moyens, l’Autorité palestinienne dit qu’elle n’a pas les moyens : nous sommes coincés entre un rocher et quelque chose d’aussi dur », a expliqué Al-Bess.


Publié le 30 juillet 2020 sur Yahoo! News
Traduction : Jean-Marie Flémal

 

 

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