De plus en plus de gros investisseurs laissent tomber les profiteurs des colonies israéliennes

Le premier fonds de pension de Norvège, KLP, a exclu 16 (seize) sociétés de ses holdings en raison de leurs liens avec les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée. Le fonds de pension a laissé tomber les profiteurs des colonies parce qu’il existe un « risque inacceptable » de les voir contribuer aux violations des droits de l’homme.

Investir dans des firmes impliquées dans les colonies illégales d’Israël en Cisjordanie présente le « risque inacceptable » de contribuer à des violations des droits palestiniens, affirme le fonds KLP, de Norvège. (Photo : Ahmad Al-Bazz / ActiveStills)

Investir dans des firmes impliquées dans les colonies illégales d’Israël en Cisjordanie présente le « risque inacceptable » de contribuer à des violations des droits palestiniens, affirme le fonds KLP, de Norvège. (Photo : Ahmad Al-Bazz / ActiveStills)

Adri Nieuwhof, 8 juillet 2021

Le désinvestissement est particulièrement significatif, non seulement en raison de son chiffre, mais aussi parce que KLP s’est appuyé sur la banque de données de l’ONU sur les sociétés impliquées dans les colonies israéliennes. KLP a déclaré avoir vendu des avoirs pour plus de 31 millions de USD dans les sociétés exclues.

Parmi ces sociétés figurent les plus grosses banques israéliennes, les sociétés de télécommunications Bezeq, Cellcom Israel et Partner Communications ainsi que plusieurs firmes du secteur de la construction.

Il convient de remarquer que Partner Communications était la filiale israélienne de la multinationale française Orange. Bien qu’Orange ait rompu ses liens avec Partner en 2016, suite à une campagne menée par des activistes en Égypte et dans d’autres pays en raison de l’implication de Partner dans les colonies et de son soutien à l’agression israélienne contre Gaza en 2014.

Précédemment, KLP avait exclu Elbit Systems et la firme allemande de matériaux de construction HeidelbergCement.  

Christy Hoffman, la secrétaire générale d’UNI Global Union, un syndicat transnational représentant 20 millions de travailleurs et qui a fait campagne autour de la question, a applaudi à l’action de KLP.

« Les investisseurs ne devraient pas profiter des violations des droits humains, comme la confiscation illégale et le peuplement des terres palestiniennes »,

a déclaré Christy Hoffman.

Le Comité national palestinien de boycott, désinvestissement et sanctions a invité instamment d’autres investisseurs à suivre l’exemple de KLP.

Un « risque inacceptable »

KLP gère des avoirs pour le secteur public pour un montant de plus de 70 milliards de USD. Le fonds s’est engagé à appliquer les principes de l’investissement éthique et du respect des droits humains. Les peuplements coloniaux d’Israël sur des terres occupées sont illégaux, aux yeux des lois internationales, et ils constituent des crimes de guerre.

C’est la raison pour laquelle le fonds KLP a conclu qu’il existait un « risque inacceptable » de pouvoir contribuer aux abus d’Israël concernant les droits humains s’il restait impliqué dans des sociétés ayant des liens avec les colonies.

Dans une déclaration expliquant sa démarche, KLP a mis en exergue l’impact négatif des colonies sur les Palestiniens, y compris

« la perte de leurs propriétés et de leur gagne-pain, leur accès très restreint aux services et les menaces à l’encontre de leur sécurité physique ».

Les systèmes complexes appliqués par Israël dans ses contrôles physiques et bureaucratiques limitent davantage encore la liberté de mouvement des Palestiniens, ajoute le fonds.

KLP a comparé ses investissements avec la banque de données de l’ONU reprenant 112 sociétés impliquées dans les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est. KLP a découvert qu’il avait des actions dans 26 de ces sociétés.

Le fonds a ensuite vérifié si les colonies pouvaient se maintenir sans les marchandises ou services fournis par ces sociétés. Finalement, KLP a exclu 16 des 26 sociétés du fait qu’elle estimait que leurs services étaient essentiels pour le maintien des colonies.  

Trois d’entre elles sont des sociétés de construction et d’ingénierie, dont la société française Alstom, qui est impliquée dans la construction du métro léger de Jérusalem destiné à relier les colonies illégales entre elles ainsi qu’à Jérusalem.

Les banques israéliennes Hapoalim, Leumi, First International, Israel Discount Bank, Mizrahi Tefahot ont été exclues pour leur

« contribution directe au développement, à l’expansion ou à l’entretien des colonies et la continuité de leurs activités ».

Liquider Motorola Solutions a été « une décision très directe » de KLP, du fait que les systèmes de sécurité par vidéo du géant américain sont utilisés dans la surveillance des Palestiniens, a rapporté Reuters.

Dans le secteur des télécom, le fonds a également largué la firme Altice Europe, installée aux Pays-Bas, ainsi que trois autres firmes israéliennes, après avoir découvert que la fourniture de leurs services de communication « faisait des colonies des zones résidentielles des plus attrayantes ».

KLP a exclu trois sociétés israéliennes spécialisées dans l’énergie parce qu’elles fournissaient de l’électricité ou carburant à des colonies.

Le fonds de pension norvégien a déclaré qu’il avait contacté toutes ces sociétés, mais qu’une seule d’entre elles avait

« montré quelque disposition à engager le dialogue et qu’aucune d’entre elles n’avait prouvé qu’elles avaient mis en place des systèmes visant à réduire le risque de futures violations des normes ».

Le fonds pétrolier norvégien

En mai, le Government Pension Fund Global, appelé également « fonds pétrolier norvégien », a annoncé l’exclusion des firmes israéliennes Shapir Engineering and Industry, et Mivne Real Estate. Le fonds pétrolier a expliqué que les investissements comportaient un

« risque inacceptable de voir les sociétés contribuer à des violations systématiques des droits des individus dans des situations de guerre ou de conflit ».

En juin, KLP a suivi l’exemple du fonds pétrolier en excluant les deux sociétés.

Mivne possède et autorise la propriété commerciale dans des zones industrielles liées aux colonies en Cisjordanie. Shapir s’occupe de construction en Cisjordanie et, entre autres, de construction d’unités de logement dans les colonies.

L’Écosse désinvestit

Pendant ce temps, le deuxième fonds de pension écossais en importance, celui des autorités locales, le Lothian, a vendu pour près de 9 millions de USD d’actions dans la banque Hapoalim. Il était ainsi le troisième fonds de pension écossais à désinvestir financièrement des colonies après le Tayside Pension Fund en 2019 et le Falkirk Pension Fund en 2018.

L’action du Lothian a eu lieu après « Time to Divest », une poussée activiste lancée par la Campagne écossaise de solidarité avec la Palestine, soutenue par nombre de partenaires, dont le plus grand syndicat des services publics du pays, Unison Scotland.  

Voici un an, le fonds de pension hollandais ABP, l’un des plus importants au monde, a désinvesti de la banque Hapoalim et de la banque Leumi. Les deux banques sont gravement impliquées dans la construction de colonies en territoire palestinien occupé.

ABP demande aux sociétés dans lesquelles il investit d’avoir une politique des droits humains lorsqu’elles opèrent dans des régions présentant un risque accru de violation, telle la Cisjordanie. Les deux banques israéliennes préfèrent ignorer cette politique et, par conséquent, ne répondent en aucun cas aux critères de l’ABP requérant que leurs investissements « contribuent à la mise en place d’un monde durable ».


Publié le 8 juillet 2021 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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