De nouvelles preuves de la façon dont l’UE entend plaire à Israël

Le soutien de l’Union européenne à Israël s’est extrêmement intensifié, ces derniers temps. Un exemple plus abominable de cette intensification accrue est celui de la bureaucratie bruxelloise qui a supprimé l’aide aux Palestiniens souffrant de cancers ou d’autres maladies graves.

 

Olivér Várhelyi, le « poteau » numéro un d’Israël à Bruxelles.

Olivér Várhelyi, le « poteau » numéro un d’Israël à Bruxelles. (Photo : Commission européenne)

 

David Cronin, 2 mars 2023

Olivér Várhelyi, le membre hongrois de la Commission européenne (l’exécutif de l’UE) est le principal coupable, ici.

Au cours de l’année 2021 et d’une bonne partie de l’an dernier, il s’est opposé à ce que soient libérés les fonds, à hauteur de quelque 230 millions de USD, prévus pour l’Autorité palestinienne. Parmi les nombreuses conséquences, il y avait le fait que de très nombreux malades se voyaient ainsi privés de traitement.

La seule raison citée par Várhelyi à ce comportement obstructif, c’était qu’il n’aimait pas ce qu’on enseignait aux enfants palestiniens à l’école. Toute aide ou presque devait être gelée – selon son raisonnement – du fait que quelques manuels scolaires ne témoignaient pas suffisamment de respect envers Israël.

Des documents obtenus par le biais d’une requête s’appuyant sur la liberté d’information fournissent quelque contexte à cette cruauté délibérée.

En mars 2021, le principal assistant de Várhelyi, László Kristóffy, avait eu avec plusieurs diplomates une discussion concernant les manuels scolaires palestiniens.

Une note d’information préparée pour Kristóffy avant cette réunion résumait une étude sur les manuels palestiniens financée par l’UE et menée par l’institut Georg Eckert (Allemagne). L’étude n’avait pas encore été publiée, mais la note à l’adresse de Kristóffy proposait un avant-goût de ses conclusions.

Selon la note destinée à Kristóffy, les manuels scolaires analysés « affirment l’importance des droits humains en général ». Une partie du matériel était néanmoins « profondément problématique », prétendait la note.

« Les manuels présentent une narration de la résistance et de l’antagonisme qui recourt rarement au terme « Israël » et comprend des représentations unilatérales de ‘l’autre’ israélien »,

ajoutait la note.

« Ceci inclut la nature et la quantité des descriptions de la violence, avec certains manuels qui proposent des exemples où la violence perpétrée par des Palestiniens est décrite comme un moyen légitime de résistance à l’occupation israélienne de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. »

La note d’information passait ensuite aux manuels destinés aux écoles palestiniennes à Jérusalem-Est occupée et que les autorités israéliennes avaient amendés.

Les révisions israéliennes, déclarait la note, étaient

« caractérisées par la suppression de contenu faisant allusion au conflit et à l’occupation, ainsi que des références à l’identité et aux symboles nationaux palestiniens, et de chapitres entiers de l’histoire régionale et palestinienne ».

Ces amendements n’étaient « pas très utiles non plus », selon la note destinée à Kristóffy.

La Commission européenne avait rédigé des notes d’information similaires à l’usage d’Olivér Várhelyi en personne. Mais les versions qui ont été rendues disponibles ne contiennent pas la légère remontrance adressée à Israël dans la note destinée à Kristóffy.

 

Coexister avec des colonisateurs ?

En juillet 2021, Várhelyi avait eu une discussion en tête-à-tête avec Charlie Weimers, un député suédois d’extrême droite et partisan enragé d’Israël.

Une note d’information rédigée à l’usage de Várhelyi avant cette rencontre se plaignait de ce que les manuels palestiniens « exprimaient de l’hostilité à l’égard d’Israël ».

En octobre de cette année, Várhelyi avait rencontré Haim Regev, l’ambassadeur d’Israël à Bruxelles.

Une note rédigée pour cette conversation suggère que l’UE a exercé de fortes pressions sur l’Autorité palestinienne et son ministère de l’Éducation à propos du contenu des programmes scolaires.

« Aussi compliqué que soit le conflit, l’Autorité palestinienne doit garantir les normes les plus élevées dans l’encouragement d’une culture de la paix et de la coexistence afin de préparer la voie vers un avenir où le conflit pourra être résolu via des négociations aboutissant à une solution à deux États »,

déclarait la note.

La note insistait sur

« l’engagement sans équivoque de l’UE à coopérer avec l’Autorité palestinienne » de sorte que le matériel scolaire suive les normes « de paix, de tolérance, de coexistence et de non-violence » des Nations unies.

On sait depuis très longtemps que l’UE et les EU ont poussé l’Autorité palestinienne à être le lèche-botte d’Israël. Généralement, cela s’est fait via la « coordination sécuritaire » entre l’AP et l’occupation militaire israélienne.

Ces notes révèlent que les personnages importants de l’UE sont heureux qu’Israël dicte ce qui doit se passer dans les classes des écoles aussi bien qu’aux check-points.

Que veulent exactement Várhelyi et ses conseillers que l’on enseigne aux enfants palestiniens dans les écoles ?

Qu’ils doivent aimer leurs oppresseurs ? Qu’ils doivent coexister avec leurs colonisateurs ?

Bien que l’UE finance l’éducation en général, elle ne paie pas les manuels scolaires – et Várhelyi le sait très bien. Cela rend inexcusable son inflexibilité à leur propos.

Pour exprimer les choses simplement, le contenu de ces ouvrages ne le regarde pas.


Absurdité

Il y a une absurdité comique dans la communication émanant de l’Union européenne.

Pourtant, il n’y a rien d’amusant à voir jusqu’où Várhelyi a pu aller pour faire plaisir à Israël, au point de priver complètement les cancéreux palestiniens d’accéder à un traitement.

Au cours du second semestre de 2022, Várhelyi a finalement autorisé l’aide qu’il avait empêché de distribuer.

Il ne semble pas avoir été châtié par sa marche arrière finale.

On peut parier à coup sûr qu’Israël et ses lobbyistes considèrent Várhélyi comme leur commissaire européen favori.

En novembre, il s’est vu décerner une récompense par l’Association juive européenne, une importante organisation pro-israélienne.

 

Une raison citée par l’organisation pour conférer cet « honneur » résidait dans les efforts de Várhélyi en vue d’assimiler la critique du sionisme – l’idéologie de l’État d’Israël – à de l’antisémitisme.

 

 

Ces quelques derniers mois, il a eu des entretiens avec un grand nombre de lobbystes pro-israéliens.

 

 

Les maigres détails sur ces entretiens rendus disponibles par la Commission européenne indiquent qu’ils étaient concentrés sur la façon dont il conviendrait de combattre l’antisémitisme.

Il est plus probable qu’il aide Israël avec ses efforts cyniques et grotesques en vue de faire du traumatisme juif une massue destinée à vaincre les Palestiniens et leurs alliés dans leur lutte.

Várhélyi a également accueilli favorablement le retour de Benjamin Netanyahou en tant que Premier ministre d’Israël.

Netanyahou dirige le gouvernement le plus ouvertement raciste depuis la création d’Israël. Les pyromanes qui siègent actuellement comme ministres perçoivent certainement Várhélyi comme leur « poteau » numéro un à Bruxelles.

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David Cronin est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Europe Israël : Une alliance contre-nature (Ed. La Guillotine – 2013) et  Europe’s Alliance With Israel: Aiding the Occupation (Pluto Press, 2011 – L’Alliance de l’Europe avec Israël contribue à l’occupation). Il a participé à la rédaction du rapport “The israeli lobby and the European Union”. 
Son dernier livre est : Balfour’s Shadow: A Century of British Support for Zionism and Israel (Pluto Press – Londres 2017).

Il a écrit de nombreux articles pour de nombreuses publications, dont The Guardian, The Wall Street Journal Europe, European Voice, the Inter Press Service, The Irish Times and The Sunday Tribune. En tant qu’activiste politique, il a tenté d’appliquer un état d’ “arrestation citoyenne” à Tony Blair et Avigdor Lieberman pour crimes contre l’humanité. 

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Publié le 2 mars 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

 

 

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