Israël tue quatre Palestiniens dans le nord de la Cisjordanie
Mercredi, les forces israéliennes ont tué quatre Palestiniens dans le nord de la Cisjordanie. On affirme que trois des hommes abattus étaient des membres des Brigades Qassam, l’aile armée du Hamas. Ils ont été tués lors d’un raid israélien à Naplouse.
Maureen Clare Murphy, 4 mai 2023
Israël a prétendu que, trois semaines plus tôt, deux des hommes avaient effectué une attaque pas balles dans la vallée du Jourdain, laquelle s’était soldée par la mort de l’épouse d’un colon israélo-britannique et de deux de ses filles.
En outre, une Palestinienne a été abattue et tuée à Huwwara, près de Naplouse, lors de ce que les autorités israéliennes ont décrit comme une attaque au couteau contre des militaires.
WAFA, l’agence de presse officielle des Palestiniens, a rapporté que, jeudi matin, des militaires israéliens avaient infiltré en secret la Vieille Ville de Naplouse et avaient assiégé une maison du quartier de Yasmina en recourant à un impressionnant déploiement de renforts militaires.
Des organes de presse palestiniens ont publié une vidéo qui, dit-on, montre l’entrée dans la zone d’hommes opérant dans la clandestinité et habillés comme des civils palestiniens, dont certains étaient même déguisés en femmes :
تغطية صحفية: "لحظة دخول المستعربين للبلدة القديمة بنابلس صباح اليوم". pic.twitter.com/y5dG3FUzyt
— شبكة قدس الإخبارية (@qudsn) May 4, 2023
Les premiers rapports suggèrent qu’Israël peut avoir utilisé la méthode de la « casserole à pression » au cours du raid. Il s’agit d’une forme d’exécution extrajudiciaire au cours de laquelle les forces d’occupation utilisent progressivement des armes de plus en plus puissantes contre le bâtiment qu’elles visent, et ce, dans un effort en vue de forcer à se rendre les gens planqués à l’intérieur. S’ils refusent de le faire, l’armée démolit le bâtiment, tuant ainsi toutes les personnes qui sont restées à l’intérieur du bâtiment assiégé.
Des témoins oculaires ont expliqué à WAFA que les forces israéliennes avaient tiré à balles réelles contre la maison assiégée et avaient même utilisé des missiles antichars tout en empêchant le personnel médical d’accéder à la zone.
Les hommes abattus ont été identifiés comme étant Muath Masri, Ibrahim Jabr et Hasan Qatnani.
تغطية صحفية: "ارتقاء الشبان حسن قطناني ومعاذ المصري منفــذا عمــلية الاغوار الأخيرة والتي قتل فيها 3 مستوطنين، والشاب إبراهيم جبر أحد مساعدي المطلوبين برصاص الاحتلال في نابلس". pic.twitter.com/r6FezBfsRA
— شبكة قدس الإخبارية (@qudsn) May 4, 2023
Un impressionnant cortège funéraire a été organisé à Naplouse en l’honneur des Palestiniens tués lors du raid de jeudi :
تغطية صحفية: "جماهير غفيرة تشيع جثمان الشبان الثلاثة في نابلس". pic.twitter.com/dLKHkADmUi
— شبكة قدس الإخبارية (@qudsn) May 4, 2023
Les autorités israéliennes ont prétendu que l’armée avait effectué un raid sur Naplouse afin d’arrêter Qatnani et al-Masri à propos de leur rôle supposé dans l’attentat meurtrier de la vallée du Jourdain.
Un directeur de la Société du Croissant-Rouge palestinien a déclaré que 166 personnes avaient été blessées lors du raid, la plupart après avoir inhalé des gaz lacrymogènes. Quatre personnes ont été blessées par des tirs à balles réelles.
Durant ce raid en plein jour, les écoles de la zone ont été obligées de suspendre leurs cours, avec toutes ces confrontations acharnées entre les forces de l’occupation et les combattants palestiniens.
Naguère assez rares, les raids diurnes se traduisant par de multiples décès palestiniens dans les zones censées sous contrôle de l’Autorité palestinienne, comme celle de Naplouse ce jeudi, deviennent de plus en plus fréquents, surtout dans le nord de la Cisjordanie.
Plus de 170 Palestiniens ont perdu la vie au cours de raids, typiquement exécutés avant l’aube, en Cisjordanie l’an dernier, selon Al Jazeera.
Jeudi, les Brigades Qassam ont déclaré que la fameuse fusillade de la vallée du Jourdain avait été une riposte aux assauts de la police israélienne contre les fidèles de la mosquée Al-Aqsa de Jérusalem lors du Ramadan.
Dans le but de tuer
Benjamin Netanyahou, le Premier ministre d’Israël, a félicité ceux qui avaient effectué le raid meurtrier de jeudi pour « avoir réglé nos comptes », suggérant que le but était bien de tuer les Palestiniens recherchés, plutôt que de les arrêter.
« Notre message à ceux qui nous font ou essaient de nous faire du tort est que cela peut prendre un jour, une semaine ou un mois, mais soyez sûrs que nous réglerons nos comptes avec vous »,
a déclaré Netanyahou.
« Qu’importe où vous essaierez de vous cacher, nous vous trouverons. Celui qui nous fait du tort renonce à sa vie. »
Les organisations des droits humains protestent depuis longtemps contre la politique israélienne du « tirer pour tuer », en disant que cela équivaut à une sentence de mort de facto, même si la peine capitale est toujours interdite dans ce pays.
Les commentaires de Netanyahou confirment que c’est bien le cas.
En 2015, l’organisation israélienne des droits humains, B’Tselem, a déclaré que Netanyahou était responsable de « la transformation de policiers, et même de civils armés, en juges et bourreaux » qui exécutent des Palestiniens soupçonnés d’agressions armées dans les rues.
Depuis lors, des dizaines de Palestiniens ont été tués par les soldats et civils armés israéliens dans ce qu’on peut considérer comme des exécutions extrajudiciaires.
Parmi ces personnes exécutées figure Iman Ziyad Odeh, 26 ans, qui a été abattue et tuée jeudi, lors d’une prétendue agression au couteau à Huwwara, une ville située au sud de Naplouse.
On rapporte qu’un soldat israélien aurait été légèrement blessé.
L’armée israélienne
« a déclaré que le soldat blessé était parvenu à repousser l’agresseuse palestinienne, avant que lui et un soldat stationné avec lui ne l’abattent »,
a rapporté The Times of Israel.
L’armée israélienne a publié une photo du couteau qu’Odeh est supposée avoir utilisé à Huwwara, où un autre Palestinien avait été tué lors d’une mise à sac de plusieurs heures par des centaines de colons en février dernier, après que deux frères israéliens avaient été abattus en ville.
Jeudi également, Israël a transféré le corps d’Abdulkarim Badi al-Shaikh, 21 ans, abattu et tué par un civil israélien le 10 mars, après avoir prétendument infiltré un avant-poste de colonie près de la ville de Qalqiliya, armé d’un couteau et d’« explosifs artisanaux », a déclaré l’armée israélienne.
Israël a l’habitude de retenir les corps des Palestiniens abattus par ses forces au cours de prétendues agressions contre des Israéliens, de sorte qu’ils peuvent être utilisés comme monnaie d’échange au cours de futures négociations.
Les forces israéliennes ont tué six Palestiniens depuis début mai, dont un adolescent de 17 ans abattu à balles réelles lors d’un raid dans le camp de réfugiés d’Aqbat Jabr, près de Jéricho, en Cisjordanie, et un homme de 58 ans qui est mort lorsque son toit s’est effondré sur lui au cours d’un bombardement israélien.
Les soldats, policiers et civils armés israéliens ont tué 109 Palestiniens depuis le début de l’année, selon les calculs de The Electronic Intifada. Ce chiffre comprend les Palestiniens décédés de blessures subies antérieurement.
Vingt Israéliens ont été tués par des Palestiniens jusqu’à présent cette année ou sont morts suite à des blessures subies antérieurement.
Les hôpitaux israéliens ont refusé le gréviste de la faim
En outre, deux Palestiniens sont morts dans les prisons israéliennes, cette année, dont le boulanger et dirigeant de faction du Djihad islamique Khader Adnan, décédé mardi matin après 86 jours de grève de la faim.
Plus d’une douzaine d’organisations palestiniennes et israéliennes des droits humains ont déclaré jeudi qu’Adnan pourrait toujours être en vie si les autorités israéliennes avaient assuré son transfert dans un site médical approprié.
Deux hôpitaux israéliens ont refusé d’admettre Adnan, prétendant qu’il ne voulait pas subir de tests et contrôles médicaux, ont déclaré les organisations des droits, et le ministère israélien de la santé
« a refusé d’intervenir et d’enjoindre aux hôpitaux d’admettre Adnan dans leurs services ».
Toutefois, comme a déclaré Amnesty International jeudi,
« un médecin qui l’a examiné lors de sa grève de la faim nous a dit que les autorités lui avaient refusé l’accès au traitement médical et au monitoring indépendants spécialisés dont il avait besoin ».
« Le docteur a déclaré que Khader Adnan avait requis d’être gardé sous surveillance médicale dans un hôpital civil, mais les Services carcéraux israéliens (IPS) l’avaient renvoyé dans sa cellule à la prison où, de demi-heure en demi-heure, les gardiens venaient voir s’il était toujours vivant. »
S’il avait été à l’hôpital,
« il aurait pu être ressuscité – un vœu qu’il avait précédemment exprimé à l’adresse du président de Médecins pour les droits humains – Israël, la docteure Lina Qasem Hassan, qui lui avait rendu visite »
en avril dernier.
Pendant ce temps, les autorités carcérales israéliennes, qui dépendent du ministre d’extrême droite israélien de la sécurité publique, Itamar Ben-Gvir, ont empêché la femme et les enfants d’Adnan de rendre visite à leur mari et père alors qu’on savait qu’il était à l’article de la mort.
« Le système inique d’arrestation et de détention pratiqué par Israël fait partie intégrante des mesures utilisées par Israël pour maintenir son régime d’occupation et d’apartheid »,
ont ajouté les organisations des droits humains.
« En ce moment, nous appelons la communauté internationale de faire en sorte qu’Israël restitue le corps de Monsieur Adnan à sa famille, afin qu’elle puisse l’enterrer. »
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Maureen Clare Murphy est rédactrice en chef de The Electronic Intifada.
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Publié le 4 mai 2023 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine