En Cisjordanie, 2023 se termine par un état de « terreur constante »

Israël soumet les Palestiniens de la Cisjordanie occupée à un état de « terreur constante », a mis en garde un rapport publié par le Bureau de l’ONU pour les droits humains.

 

17 décembre 2023. Des Palestiniens en deuil autour du corps d’Aziz Abd al-Rahim Akhlail, dans le village de Beit Ummar, dans le sud de la Cisjordanie occupée.

17 décembre 2023. Des Palestiniens en deuil autour du corps d’Aziz Abd al-Rahim Akhlail, dans le village de Beit Ummar, dans le sud de la Cisjordanie occupée. (Photo : Mamoun Wazwaz / APA images)

 

Tamara Nasser, 1er janvier 2024

Alors que l’actuel génocide perpétré par Israël sur les Palestiniens de la bande de Gaza se poursuit de façon ininterrompue, 2023 aura été l’année la plus meurtrière en Cisjordanie occupée depuis 2005, c’est-à-dire l’année où l’organisation de surveillance de l’ONU, l’OCHA, s’est mise à tenir le compte des pertes en vies humaines.

Avec plus de 120 enfants palestiniens tués par les forces israéliennes dans la région cette année, l’UNICEF, l’agence de l’ONU pour les enfants, a également qualifié 2023 d’« année la plus meurtrière » pour les enfants palestiniens en Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est.

 

Volker Türk, le responsable de l’ONU pour les droits humains, a mis en garde contre la montée subite, « extrêmement troublante », de la violence israélienne contre les Palestiniens en Cisjordanie.

« L’intensité de la violence et de la répression est quelque chose qu’on n’avait pas vu depuis des années », a-t-il dit.

En 2023, plus de 500 Palestiniens ont été tués par des tirs israéliens en Cisjordanie occupée, soit trois fois plus que l’année précédente.

Plus de 60 pour 100 des homicides israéliens en Cisjordanie occupée ont eu lieu après le 7 octobre, quand une opération militaire du Hamas dans les colonies du sud d’Israël a infligé à l’establishment militaire une cinglante défaite et qu’Israël a lancé une campagne génocidaire de tuerie, de destruction et de déplacement forcé dans la bande de Gaza.

 

En fait, même avant que la violence de l’État et des colons israéliens ne monte en flèche le 7 octobre, cette année était déjà la plus meurtrière jamais enregistrée par l’OCHA, l’organisation de surveillance de l’ONU.

Depuis lors, les troupes israéliennes ont tué près de 300 Palestiniens en Cisjordanie occupée et huit de plus ont été tués par les colons. Les forces israéliennes ont blessé près de 4 000 Palestiniens en Cisjordanie, dont au moins 580 enfants.

Les attaques des colons

Alors que l’attention se concentrait sur Gaza, les colons ont provoqué une seconde Nakba, en Cisjordanie occupée.

Cette année a marqué « une augmentation sans précédent des constructions illégales par les colons, depuis la Seconde Intifada », a déclaré le bureau de l’ONU pour les droits humains, en se basant sur des recherches effectuées par des organisations israéliennes.

Quelque 370 attaques de colons israéliens contre des Palestiniens ont été répertoriées depuis le 7 octobre, y compris des attaques contre les biens et les personnes.

« Dans bien des incidents, les colons étaient accompagnés par [les forces israéliennes], ou portaient eux-mêmes des uniformes [des forces israéliennes] ainsi que des fusils de l’armée »,

expliquait le rapport des droits humains de l’ONU.

Les colons israéliens ont tué au moins huit Palestiniens au cours de trois incidents différents, cette année.

Ils ont mené des attaques organisées contre des communautés d’élevage palestiniennes afin de les chasser de leurs terres. Ils menacent les Israéliens à la pointe du fusil, vandalisent leurs propriétés, les empêchent d’accéder à l’eau, détruisent leurs arbres, endommagent leurs véhicules, volent leurs biens, se livrent à des intimidations et à des agressions physiques.

Ceci vise « à les terroriser et à les inciter à quitter leurs foyers et leurs terres », a déclaré le bureau de l’ONU pour les droits humains.

Les colons israéliens et les restrictions d’accès imposées par les forces d’occupation israéliennes ont chassé plus de 1 200 Palestiniens de leurs foyers et communautés depuis le 7 octobre.

Cela correspond à près de 200 ménages dans 15 communautés différentes d’éleveurs et de Bédouins, et cela représente près de 80 pour 100 de tous les déplacements forcés de Palestiniens de la région depuis le début de l’année.

Plus d’une moitié de ces déplacements ont eu lieu durant trois journées, en octobre.

« Depuis le 7 octobre, les colons, avec le soutien des principaux ministres, tirent parti d’un environnement généralement permissif pour accélérer le déplacement de Palestiniens hors de leurs terres »,

a déclaré le bureau de l’ONU pour les droits humains.

La campagne accélérée d’Israël de déplacement forcé en Cisjordanie ne peut être perçue séparément du déplacement massif des Palestiniens de la bande de Gaza.

Tous deux figurent dans le cadre de l’unique principe organisationnel de l’État d’Israël : « éloigner les Palestiniens de leur patrie de façon à pouvoir les remplacer par des colons juifs étrangers », comme l’écrit Maureen Clare Murphy dans The Electronic Intifada.

C’est une continuation de la Nakba, quand les forces paramilitaires sionistes qui, plus tard, allaient former l’armée israélienne, ont nettoyé ethniquement des centaines de Palestiniens de leurs terres afin de faire de la place pour l’État d’Israël en 1948.

Même avant le 7 octobre, on s’inquiétait déjà de ce que le gouvernement israélien s’alignait sur

« les buts du mouvement des colons israéliens pour étendre son contrôle à long terme sur la Cisjordanie occupée, en pratique pour intégrer davantage ces régions au territoire de l’État d’Israël ».

Le bureau de l’ONU pour les droits humains a estimé le nombre de colons israéliens en Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est, à 700 000.

Toutes les colonies d’Israël en Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est, et dans les hauteurs syriennes du Golan, sont illégales, selon les lois internationales et sont considérées comme un crime de guerre.

 

Les bombardements aériens

Depuis le 7 octobre, l’armée israélienne a intensifié ses bombardements aériens contre les Palestiniens de la Cisjordanie occupée.

« Actuellement, les forces israéliennes utilisent des drones aériens armés qui effectuent des attaques contre les Palestiniens de la Cisjordanie occupée »,

a déclaré Ayed Abu Eqtaish, directeur du programme de responsabilisation de Defense for Children International – Palestine (DCI-P).

Le bureau de l’ONU pour les droits humains a déclaré qu’Israël avait utilisé des engins aériens sans équipage et autres moyens de frappes aériennes en 12 occasions au moins, ce qui constitue une très nette escalade dans ce que l’ONU a qualifié de « recours illégal à des tactiques militaires et à des armes de guerre ».

Les frappes de drones israéliens en Cisjordanie occupée ont tué 14 enfants palestiniens en 2023, alors qu’Israël a utilisé un hélicoptère Apache, de fabrication américaine, pour tirer des missiles et tuer ainsi quatre enfants. Une frappe d’avion de combat israélien a tué un autre enfant en Cisjordanie, pendant ce temps.

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Publié le 1er janvier 2024 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal, Charleroi pour la Palestine

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