Les agressions par des colons augmentent de 78 % durant la pandémie

Confrontés à des attaques constantes, les Palestiniens luttent pour prendre des précautions sanitaires vis-à-vis de la pandémie du coronavirus. En fait, les colons exploitent le confinement afin de multiplier leurs agressions à un moment où les résidents palestiniens ne leur opposeront que peu de résistance.

Tamara Nassar, 11 avril 2020

Pendant la pandémie, les forces de l'armée israélienne et les colons continuent leurs attaques

3 avril 2020. Les forces israéliennes prennent position lors des confrontations avec des manifestants palestiniens dans le village de Kfar Kaddum, près de Naplouse, en Cisjordanie occupée. (Photo : Shadi Jarar’ah APA images)

En Cisjordanie occupée, la pandémie de Covid-19 a donné lieu à une augmentation spectaculaire de la violence des colons israéliens à l’égard des Palestiniens.

Même après que le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a demandé un cessez-le-feu mondial afin d’enrayer la propagation de la pandémie, Israël a tué deux Palestiniens, dont un enfant, et a encore accru le nombre de ses agressions.

Israël a poursuivi ses

« raids militaires en Cisjordanie, a opéré de très nombreuses arrestations et mises en détention administrative, a autorisé une grave recrudescence de la violence des colons et a poursuivi son blocus draconien de la bande de Gaza »,

a rapporté l’organisation palestinienne des droits de l’homme, Al-Haq.

Au cours de la seconde quinzaine de mars, le nombre d’attaques des colons contre les Palestiniens a été de 78 pour 100 plus élevé que d’habitude, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (BCAH ou OCHA, en anglais).

Pendant ce temps,

« au moins 16 attaques par des colons israéliens se sont soldées par 5 Palestiniens blessés et d’importants dégâts à des biens et propriétés »,

rapporte encore le BCAH.

Alors que Mohammad Shtayyeh, le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, imposait un confinement de deux semaines à tous les Palestiniens de Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, sa décision, dans le même temps, ne portait en aucun cas sur les quelque 800 000 Israéliens vivant dans des colonies illégales.

Ces colons partagent certaines routes, magasins d’alimentation et pompes à essence avec les Palestiniens, soumettant fréquemment ces derniers à du harcèlement verbal, à des agressions physiques et à des détériorations de biens et propriétés.

Les forces israéliennes

« ne sont pas intervenues pour empêcher le comportement illicite mais, au contraire, ont apporté leur soutien et protection aux colons, faisant en sorte que ces individus ne soient en aucun cas tenus pour responsables et consolidant ainsi le régime existant de l’impunité »,

rapporte Al-Haq.

Les colons bénéficient d’une impunité quasi totale dans la violence qu’ils imposent aux Palestiniens, ce qui encourage plus encore leurs agressions.

Confrontés à des attaques constantes, les Palestiniens luttent pour prendre des précautions sanitaires vis-à-vis de la pandémie du coronavirus. En fait, les colons exploitent le confinement afin de multiplier leurs agressions à un moment où les résidents palestiniens ne leur opposeront que peu de résistance.

Une attaque contre un cimétière

Jeudi, des colons israéliens ont vandalisé des pierres tombales dans un cimetière palestinien du village cisjordanien de Burqa.

Ghassan Daghlas, qui tient à l’oeil les activités des colons dans le nord de la Cisjordanie, a déclaré à l’agence d’information palestinienne WAFA que les colons pénètrent dans le village en passant par la colonie israélienne toute proche (évacuée) de Homesh.

Homesh a été vidée de ses résidents israéliens en 2005, dans le cadre du prétendu « désengagement » israélien de Gaza et de plusieurs villages cisjordaniens. Cette terre, qui appartenait au village de Burqa, avait été déclarée zone militaire fermée dans les années 1970.

Le mois dernier, des colons ont battu et lapidé un fermier qui se rendait à sa terre située dans la zone de Homesh.

« L’un d’eux avait un pistolet en main », a expliqué à Al-Haq Ali Mustafa Mohammad Zubi, le fermier en question, âgé de 55 ans.

« Chaque fois que j’essayais de me relever et de m’encourir, ils me repoussaient au sol, me battaient et m’insultaient verbalement. »

Frappé à l’aide d’une hache

Par ailleurs, le 24 mars, un Palestinien a été hospitalisé après que des colons l’ont agressé à coups de hache dans le village cisjordanien d’Umm Safa, à l’ouest de Ramallah.

Un colon a mené un troupeau de 50 vaches dans une oliveraie à l’ouest du village.

Huit résidents du village, accompagnés du chef-adjoint du conseil local, Naji Tanatrah, lui ont demandé de quitter le village. Quand il a commencé à le faire, cinq colons armés sont arrivés, tous munis de haches et l’un d’eux au moins d’une arme à feu, et ils s’en sont pris à Tanatrah, a rapporté B’Tselem.

L’un des colons a frappé Tanatrah, 45 ans, d’un coup de hache à la tête. L’homme est tombé sur le sol, ensanglanté, et les colons ont continué à lui taper dessus.

Des résidents sont parvenus à reprendre Tanatrah et à l’emmener à un hôpital de Ramallah, où il a été opéré, après que les médecins ont diagnostiqué une fracture du crâne.

« J’ai passé cinq jours à l’hôpital et je suis sorti dès que j’ai pu, de crainte d’attraper le corona », aurait déclaré Tanatrah, d’après le quotidien israélien Haaretz.

Le lendemain, des dizaines de colons ont essayé d’entrer dans le village d’Einabus, également dans la zone de Naplouse.

Dans le même temps, des colons ont attaqué un berger dans le village d’al-Tuwani, dans les colines au sud de Hébron.

 

Le 27 mars, six colons, dont certains armés, ont attaqué le berger au moment où il faisait paître son trouveau, a rapporté B’Tselem.

Le chien de l’un des colons l’a mordu au bras et à l’abdomen. L’homme a été emmené dans une clinique médicale où il a reçu une injection contre la rage.

Le lendemain, des colons ont jeté des pierres vers trois résidents qui s’en retournaient à al-Tuwani.

D’autres villageois sont venus aider les résidents jusqu’au moment où les forces israéliennes sont arrivées sur les lieux et ont lancé des grenades de gaz lacrymogène contre les villageois.

Les forces israéliennes ont arrêté trois des villageois et en ont relâché deux sous caution.


Publié le 11 avril 2020 sur The Electronic Intifada
Traduction : Jean-Marie Flémal

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